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l’œuvre fut continuée et achevée plus tard dans un autre style ce qui en rend l’étude difficile. L’ensemble se composait de sept pièces formant quatre-vingt-dix tableaux dont soixante-neuf subsistent. Chaque pièce montre sous une sorte de loggia gothique hérissée de gables et de pyramidions, un personnage assis, feuilletant l’Apocalypse, et enveloppé de draperies d’une flaccidité très caractéristique. Autour de chacune de ses grandes figures largement conçues, se développent quatorze tableaux illustrant les visions du solitaire de Pathmos. Dans le haut se groupent des anges chanteurs, musiciens ou porte-écussons.

On a voulu voir dans ces tapisseries, une ébauche du Retable de l’Agneau. L’éloge est excessif.





Jean-Pépin de Huy
Tombeau de Robert d’Artois
1317, Eglise Saint-Denis, Seine.


Ces tapisseries, pour ne pas être à la hauteur des miniatures de Jean de Bruges ou des sculptures d’un Jean de Liège, confirment néanmoins nos remarques sur les liens étroits de l’art français et de l’art flamand au XIVe siècle et sur l’intervention significative de nos maîtres dans la première Renaissance des Valois.

Toutefois dans le dernier quart du XIVe siècle l’esthétique picturale s’achemine en France vers une formule éclectique. L’élégance et la mièvrerie françaises, la recherche plus septentrionale de l’expression individuelle parfois poussée jusqu’à la grimace, se combinent avec des tendances voisines de l’art colonais — ou de la beauté siennoise telle que la faisaient connaître non seulement les fresques avignonnaises de Simone di Martino mais encore les travaux des Italiens travaillant chez le roi et le duc de Berry. Nous avons vu cette formule apparaître dans le Calvaire de Saint-Sauveur à Bruges. Elle se manifestait aussi dans une série d’œuvres

    de composition aux tableaux de la tapisserie d’Angers. Cf. Guiffrey. Mémoires de la société de l’histoire de Paris. T. X ; Giry, l’Art, décembre 1876 ; de Farcy, Histoire et description des tapisseries de la cath. d’Angers, Desclée et Brouwer ; L. Delisle et Meyer, l’Apocalypse en français au XIIIe siècle (Soc. des anciens textes. Firmin-Didot, 1901) et G. Migeon, À propos de la tenture de l’Apocalypse, Chronique des Arts, 7 mai 1904.