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Dijon, dans la chapelle de la Chartreuse nouvellement édifiée, et le sculpteur termondois suivit son œuvre en Bourgogne pour la parachever sur place. Quand il eut fini, l’essentiel manquait. Les volets devaient recevoir extérieurement des peintures représentant des compositions évangéliques ; les statuettes des taveliaux devaient être polychromées et dorées. Malgré la présence à Dijon de Jean de Beaumetz, autre peintre du duc, le nom de Melchior Broederlam s’imposa à l’esprit de Monseigneur. L’artiste yprois se trouvait alors à Hesdin ou à Paris. On le prévint. Il rentra à Ypres où les retables le joignirent. En 1399 peintures et dorures étaient achevées et les chefs d’œuvre reprenaient le chemin de Dijon enfermés dans deux coffres en bois d’orme. Une commission artistique les examina. Jean de Beaumetz la présidait. L’œuvre du maître yprois fut jugée loyalement peinte et Broederlam, sur le champ, reçut une gratification.

Ce travail capital n’avait point absorbé toute l’activité de Melchior. En 1395 il était allé estimer à Gand les verrières exécutées dans le château du duc — le Zaelhof — par le peintre verrier Jean de Bouvekerke, et peindre un panonceau représentant un chevalier à cheval avec les armes de Bourgogne et de Flandre. En 1403 il se rendit de nouveau en Bourgogne et accomplit le retour en quinze jours. En 1406 il peignit les armes de Bourgogne sur les bannières d’Ypres et dessina cinq patrons de costumes pour les magistrats de la ville. En 1407 il fut appelé à Courtrai par les chanoines de Notre-Dame pour peindre dans la chapelle des comtes les portraits de Philippe le Hardi et de sa femme Marguerite, œuvres dont il ne reste plus trace. En 1409-1410 son nom paraît pour la dernière fois. Le peintre des retables de Dijon fournit le modèle d’un bijou réunissant un lis, une rose, un lion et destiné à la société de Rhétorique qui aurait composé le plus beau poème sur Notre-Dame de Thuyne, patronne de la ville d’Ypres.

Il fut un temps où toutes les peintures de la fin du XIVe siècle étaient attribuées à Broederlam. En réalité on ne possède de lui qu’une œuvre parfaitement authentique : c’est le retable de la Chartreuse de Dijon.[1] Des quatre volets peints par Melchior pour l’œuvre de Jacques de Baerze

  1. Nulle vraisemblance que la peinture de l’Hospice Belle à Ypres soit de Broederlam ; M. Hulin attribue au peintre yprois la charmante Vierge de M. Aynard qui figura aux Primitifs français. Cf. L’Exposition des Primitifs français au point de l'influence des van Eyck. 1904. p. 15. Nous reparlerons de cette œuvre généralement attribuée à Malouel.