Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 4.djvu/95

Cette page a été validée par deux contributeurs.

sortir le lord, sans lui dire qu’elle vouloit lui parler. Cependant elle imagina un projet dont elle ne doutoit pas qu’il n’embrassât avec ardeur l’exécution.

Lord Fellamar (ainsi se nommoit le jeune seigneur) ne fut pas plus tôt entré chez lady Bellaston, qu’elle lui dit : « Bon Dieu, milord, vous êtes encore ici ? Je craignois que mes gens, malgré les ordres que je leur avois donnés, ne vous eussent laissé partir. Je désirois de vous entretenir d’une affaire de quelque importance.

— En vérité, milady, répondit le lord, je ne m’étonne point que la longueur de ma visite vous ait surprise. Elle a duré deux grandes heures, et m’a paru plus courte de moitié.

— Que dois-je en conclure, milord ? La compagnie de celle qui peut faire oublier ainsi le temps, doit être bien agréable.

— Sur mon honneur, la plus agréable du monde. Dites-moi, je vous prie, milady, quel est cet astre éblouissant que vous avez tout-à-coup fait briller à nos yeux ?

— De quel astre parlez-vous, milord ? dit lady Bellaston avec un feint étonnement.

— Je parle de la jeune personne que je vis ici l’autre jour, à qui je donnai le bras hier au spectacle, de l’objet enfin de cette visite si ridiculement longue.