Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 4.djvu/85

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ou ma cousine seroit peu disposée à se soumettre aux ordres même les plus formels, s’il s’agissoit du sacrifice de son inclination.

— Ne calomniez pas ma fille, s’écria le vieillard avec émotion ; ne calomniez pas mon Henriette. Je lui ai appris à n’avoir d’autre inclination que la mienne. En lui laissant faire tout ce qu’elle veut, je l’ai accoutumée à n’aimer que ce qui me plaît.

— Pardonnez-moi, monsieur, loin de vouloir faire injure à ma cousine, je suis pénétré d’estime pour elle. J’espère d’ailleurs que vous ne la mettrez point à une si rude épreuve, et que vous ne lui imposerez jamais la rigoureuse loi à laquelle vous prétendez m’astreindre : mais, monsieur, allons rejoindre la compagnie ; on pourroit s’inquiéter de notre longue absence. J’ose demander une grace à mon cher oncle, c’est de ne rien dire qui puisse affliger la pauvre Nancy, ou sa mère.

— Oh ! n’ayez pas peur, je sais trop bien vivre pour manquer à des femmes. Ainsi je vous accorde volontiers la grace que vous désirez, et j’en attends une de vous en retour.

— Mon oncle, il y a bien peu de vos ordres que je ne me fasse un plaisir d’exécuter.

— Je ne vous demande qu’une chose, c’est de m’accompagner chez moi ; j’y veux traiter un peu plus à fond l’affaire avec vous ; car j’ai à cœur de sauver, s’il est possible, l’honneur de ma famille,