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« Chère Nancy,

« N’ayant pu me résoudre à vous apprendre de vive voix une nouvelle qui vous affligera sans doute autant que moi, j’ai pris le parti de vous l’écrire. Mon père exige impérieusement que dès aujourd’hui je fasse ma cour à une jeune et riche héritière qu’il me destine pour… Ma main se refuse à tracer un mot odieux. Votre excellent esprit vous fera sentir l’indispensable nécessité où je suis de me soumettre à un ordre qui doit hélas ! m’arracher de vos bras pour toujours. La tendresse de votre mère doit vous encourager à lui confier les suites malheureuses de notre amour. Il est facile d’en dérober la connoissance au public. J’aurai soin de pourvoir à tous vos besoins. Je souhaite que vous souffriez moins que moi du coup qui nous sépare. Armez-vous de courage, pardonnez à un homme que la perspective d’une ruine certaine pouvoit seule contraindre à vous écrire cette lettre… Oubliez-moi, je vous en conjure, comme amant, je veux dire ; mais comme ami, comptez à jamais sur votre fidèle et infortuné

« J. N. »

Lorsque Jones eut achevé la lecture de cette lettre, mistress Miller et lui restèrent un instant