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coup de peine que vous n’en aviez guère profité.

— Ô monsieur, si vous saviez quelle noire et profonde scélératesse causa ma ruine, sans me juger innocente, vous me trouveriez peut-être moins coupable et digne de compassion. Vous n’avez pas maintenant le loisir d’entendre le récit de mon histoire. Ce que je puis vous attester, c’est que je fus trompée par une promesse solennelle de mariage. Je fus même réellement mariée devant Dieu au perfide qui m’abusa ; car je me suis convaincue par la lecture d’un grand nombre d’ouvrages, que les cérémonies publiques ne sont requises que pour donner au mariage une sanction légale, et assurer à une femme les droits d’épouse ; mais lorsqu’après une union sacrée, quoique formée en secret, une femme demeure constamment attachée à l’objet de sa tendresse, quelque nom qu’il plaise au monde de lui donner, sa conscience a peu de chose à lui reprocher.

— Je suis fâché, madame, que vous ayez fait un si mauvais usage de votre instruction. C’eût été un bonheur pour vous d’en avoir acquis davantage, ou d’être restée dans une complète ignorance. J’ai peur que cette faute ne soit pas encore la seule que vous ayez commise ; mais continuez.

— Tant que vécut celui qui m’avoit bercée d’un vain espoir, je lui gardai, je vous jure, une fidélité inviolable ; et considérez, monsieur, comme