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lettre de ce garnement. Je n’ai pas eu la patience d’en lire la moitié, car elle est plus longue qu’un sermon du ministre Supple ; mais j’ai vu clairement qu’elle ne rouloit que sur l’amour : et pouvoit-il en effet y être question d’autre chose ? Je vous l’ai de nouveau claquemurée dans sa chambre ; et si elle ne consent pas à épouser sur-le-champ votre neveu, dès demain matin je l’embarque pour la campagne, où elle passera le reste de ses jours enfermée dans un grenier, sans autre nourriture que du pain et de l’eau ; et plus tôt la coquine rendra l’ame, tant mieux ce sera… Le diable m’emporte, l’arrêt me semble pourtant un peu dur… mais non, elle vivra assez long-temps pour me désespérer.

— Monsieur Western, vous savez que je me suis toujours prononcé contre la violence, et vous aviez consenti vous-même à ne pas l’employer.

— Oui, mais c’étoit à condition qu’elle obéiroit de bonne grace. De par le diable et le docteur Faust[1], n’ai-je pas le droit de disposer de ma fille comme il me plaît, surtout quand je ne veux que son bien ?

— Écoutez, voisin, j’essaierai, si vous le permettez, de lui faire entendre raison.

— Si je le permets ? vraiment c’est parler en

  1. Prétendu magicien, dont il existe une histoire curieuse traduite de l’allemand et imprimée à Cologne en 1712.Trad.