— Milord, il dépend de vous de me donner une preuve d’affection qui me toucheroit beaucoup plus que votre amour, et m’inspireroit aussi plus de reconnoissance.
— Quelle est-elle, mademoiselle ? dit-il avec feu.
— Milord, reprit Sophie en baissant les yeux sur son éventail, vous n’ignorez pas, je pense, les peines que m’a causées votre prétendue passion.
— Pouvez-vous être assez injuste pour la nommer ainsi ?
— Oui, milord, toute protestation d’amour faite à l’objet qu’on persécute est à la fois une imposture et un outrage. Je ne vois dans vos efforts obstinés pour obtenir ma main qu’une persécution cruelle. Je dirai plus : il est peu généreux à vous d’abuser de la sorte du malheur de ma position.
— Ô la plus charmante, la plus adorable des femmes ! ne m’accusez pas d’une telle indignité, quand votre honneur, votre intérêt me sont si chers, quand je n’ai d’autre dessein, d’autre espoir, d’autre ambition que de mettre à vos pieds ma personne, mes titres, ma fortune, enfin tout ce que je possède.
— C’est à cette fortune, milord, c’est à ces titres que vous devez l’avantage dont je me plains.