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Réflexion assez juste, et qui explique la mutuelle tendresse qu’on voit régner ensuite dans un si grand nombre d’heureux ménages.

Lady Bellaston tint le même langage à lord Fellamar. Il embrassa son avis avec tant de chaleur, que mistress Western, à sa prière, fixa le lendemain pour une entrevue particulière entre le lord et Sophie. Elle instruisit sa nièce de cette détermination, et la pressa en termes si impérieux d’y souscrire, que la jeune personne, après une longue et vaine résistance, finit par lui donner la plus grande preuve de complaisance qui fût en son pouvoir : elle consentit à voir le lord.

Comme il ne se passe rien pour l’ordinaire de bien intéressant, en pareille circonstance, on nous pardonnera de ne pas entrer dans les détails de cette entrevue. Le lord débuta par des protestations du plus pur, du plus ardent amour ; Sophie rougit et garda un moment le silence, puis recueillant ses esprits : « Milord, dit-elle d’une voix foible et tremblante, je vous laisse à juger si vos protestations actuelles s’accordent bien avec la conduite que vous avez tenue dernièrement envers moi.

— N’est-il donc, mademoiselle, aucun moyen d’expier un instant de délire ? Ma téméraire ardeur a dû vous convaincre que la violence de l’amour m’avoit ôté l’usage de la raison.