— Fort bien, je me rends à vos désirs. Vous savez, Sophie, que je vous aime, et ne puis vous rien refuser. Vous connoissez la facilité de mon caractère ; je n’ai pas toujours été si indulgente ; je passois autrefois pour cruelle, aux yeux des hommes s’entend ; on m’appeloit la cruelle Parthenisse. Que de vers adressés à la cruelle Parthenisse j’ai livrés aux flammes ! Sophie, je n’ai jamais été aussi jolie que vous ; cependant j’avois, dans ma jeunesse, quelque chose de vos traits. Je suis un peu changée. Les royaumes et les empires changent avec le temps, comme dit Tullius Cicéron dans ses épîtres. Il en est de même de la figure humaine. » Mistress Western s’étendit encore sur le chapitre de ses conquêtes et de sa cruauté, pendant près d’une demi-heure, c’est-à-dire jusqu’à l’arrivée du lord qui, après une visite très-ennuyeuse, durant laquelle mistress Western ne s’absenta pas un moment, se retira presque aussi mécontent de la tante que de la nièce ; car mistress Western que Sophie avoit mise de bonne humeur, et dans des dispositions favorables, étoit convenue avec elle de la nécessité de tenir à une certaine distance un amant aussi entreprenant que lord Fellamar.
Ainsi notre héroïne, par une adroite flatterie dont personne ne s’avisera sûrement de la blâmer, obtint un peu de repos, et recula du moins