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en avons vu de nombreux exemples, et mistress Fitz-Patrick nous en offre un des plus frappants. Elle commençoit, en ce moment, à éprouver pour Jones un sentiment dont elle comprit plus tôt la nature, que n’avoit fait autrefois la pauvre Sophie.

La beauté parfaite dans l’un et l’autre sexe a, sans contredit, un attrait plus irrésistible qu’on ne l’imagine communément. Bien des gens, à la vérité, se contentent d’un moindre lot ; semblables à des enfants qui répètent une leçon sans y rien comprendre, ils apprennent par routine à mépriser les agréments extérieurs, et à mettre un grand prix à des charmes plus solides. Cependant nous avons toujours observé qu’à l’approche d’une beauté accomplie, ces charmes plus solides pâlissent, comme les étoiles, au lever du soleil.

Lorsque Jones eut fini ses exclamations dont plusieurs n’auroient pas été déplacées dans la bouche du tendre et magnanime Orondate, mistress Fitz-Patrick détourna les yeux qu’elle avoit tenus quelque temps fixés sur lui, et les baissant vers la terre : « Que je vous plains, M. Jones ! s’écria-t-elle. Faut-il que vous brûliez d’une si vive flamme pour une personne qui s’y montre insensible ! Je connois ma cousine mieux que vous, M. Jones, et je dois dire qu’une femme qui ne