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dans une union où tout se met en commun, hors le cœur, qu’à goûter le plaisir de la haine.

Blifil rencontra cependant un obstacle à ses desseins ; et cet obstacle vint de M. Allworthy. Ce digne homme à qui on n’avoit pu cacher la fuite de Sophie, ni en déguiser le motif, instruit par cet événement de l’extrême aversion qu’elle avoit pour son neveu, commença à craindre sérieusement qu’on ne l’eût trompé, en l’engageant à pousser les choses si loin. Il ne partageoit point les principes de ces parents qui ne croient pas plus nécessaire de consulter, en fait de mariage, l’inclination de leurs enfants, que de demander l’agrément de leurs domestiques, quand ils veulent entreprendre un voyage, et qui ne s’abstiennent souvent d’user de violence que par la crainte des lois, ou du moins par respect humain. Convaincu qu’il n’y a rien de plus sacré que l’institution du mariage, il pensoit qu’on ne devoit négliger aucune précaution pour conserver sainte et pure l’union conjugale, et concluoit très-sagement que le meilleur moyen d’atteindre ce but, étoit de prendre d’abord pour base une affection réciproque.

Blifil dissipa bientôt le chagrin qu’éprouvoit son oncle d’avoir été trompé, en lui jurant qu’il avoit été trompé lui-même ; et ses protestations s’accordoient parfaitement avec les assurances