tres, que dans la vue de découvrir leurs défauts et de les divulguer, mérite le titre de détracteur des hommes, le critique qui lit un ouvrage dans le même esprit de malveillance, mérite également le titre de détracteur des livres.
Le vice n’a pas à notre avis d’esclave plus abject ; la société d’ennemi plus odieux, ni le diable de plus digne et de plus cher disciple, qu’un détracteur. Nous craignons que le monde ne ressente pas pour ce monstre la moitié de l’horreur qu’il doit inspirer, et nous n’osons assigner les motifs d’une si criminelle indulgence. Il est certain pourtant que le voleur semble presque innocent, au prix du détracteur. L’assassin même paroît quelquefois moins coupable que lui. La détraction est une arme plus cruelle que le poignard ; car les blessures qu’elle fait sont toujours incurables. On peut la comparer au plus lâche, au plus exécrable des crimes, à l’empoisonnement : moyen de vengeance si vil et si horrible, que jadis nos lois le distinguoient sagement des autres meurtres, par la rigueur du supplice dont elles le punissoient.
Outre les maux affreux que cause la détraction, et les méprisables ressorts qu’elle emploie, il y a des circonstances qui en aggravent singulièrement l’atrocité. La plupart du temps elle agit sans provocation, sans espoir de récompense, à