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TOM JONES.

s’est passé entre votre fille et mon neveu, pas plus tard qu’hier.

— Oui, monsieur, et c’est précisément après ce qui s’est passé hier, entre votre neveu et ma fille, que j’ai éventé la mèche. M. Blifil étoit à peine sorti, que le drôle est venu fureter autour de la maison. Quand je l’attirois chez moi, comme chasseur, je ne me doutois guère qu’il n’avoit en tête d’autre idée que de prendre ma fille au piége.

— Franchement, j’aurois souhaité que vous lui donnassiez moins d’occasions de se trouver avec elle. Vous devez vous souvenir que j’ai toujours désapprouvé ses longs séjours dans votre maison, quoiqu’à dire vrai, ils ne m’inspirassent aucun soupçon de ce qui est arrivé.

— Eh ! qui en auroit eu ? Que diable avoit-il affaire à ma fille ? Je l’invitois à chasser avec moi, et non à lui faire la cour.

— Est-il possible que les voyant si souvent ensemble, vous n’ayez observé entre eux aucun signe d’intelligence ?

— Non, sur mon ame, pas un. Je ne l’ai pas vu l’embrasser une seule fois. Loin de lui faire la cour, il étoit d’ordinaire plus silencieux devant elle, qu’en son absence. De son côté, ma fille se montroit moins polie pour lui, que pour aucun des jeunes gens qui fréquentoient la maison. Je