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grand matin, et partirent de Worcester deux heures avant le jour, favorisés par la lune, qui brilloit dans un ciel sans nuages.

Mistress Waters n’étoit point de ces petites maîtresses qui doivent à l’invention des voitures la faculté de se transporter d’un lieu à un autre, et pour qui un carrosse est au nombre des nécessités de la vie. Robuste, alerte, d’un caractère décidé, elle étoit en état de lutter de vitesse avec son agile amant.

Après avoir fait plusieurs milles sur une grande route que Northerton assuroit être celle de Hereford, ils arrivèrent au point du jour à l’entrée d’une forêt. L’enseigne s’arrêta tout court, feignit de réfléchir un moment, et témoignant à sa compagne quelque inquiétude de suivre plus long-temps un chemin si fréquenté, il lui persuada sans peine de prendre un sentier qui paraissoit traverser directement la forêt, et qui les conduisit au pied de la montagne de Mazard.

L’exécrable attentat de Northerton fut-il l’effet d’une pensée soudaine, ou d’un dessein prémédité ? C’est ce que nous ne saurions dire. Quoi qu’il en soit, à peine fut-il arrivé dans ce lieu solitaire où, suivant toutes les apparences, il n’avoit à craindre d’être surpris par personne, qu’il défit sa jarretière, se saisit avec violence de la