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près ce qui s’est passé, vous ayez l’audace de me faire une pareille proposition. Apprenez, misérable, que j’ai l’ame trop fière pour me vêtir de vos guenilles. »

Ici Jones intervint et pria mistress Waters de pardonner à l’hôtesse, et d’accepter sa robe. « Il faut avouer, dit-il, que nous avions, à notre arrivée, l’air un peu suspect. Je suis convaincu que la conduite de cette brave femme ne doit s’attribuer, comme elle l’assure, qu’au désir de conserver la bonne réputation de son auberge.

— C’est cela même, répartit l’hôtesse, monsieur parle en gentilhomme, et je vois clairement qu’il en est un. Il n’y a pas sur toute la route une maison mieux famée que la mienne. Je puis me vanter qu’elle est fréquentée par la première noblesse de l’Angleterre et de l’Irlande. Personne au monde n’oseroit me démentir. Je le répète, si j’avois su qui étoit madame, je me serois plutôt brûlé la langue, que de lui faire un affront. Mais en vérité, dans une maison où les gens de qualité viennent loger et dépenser leur argent, je ne voudrois pas qu’ils fussent scandalisés par la rencontre d’un tas de gueuses qui laissent partout après elles, moins d’espèces que de vermine. Ces drôlesses-là ne m’inspirent nulle pitié. C’est une folie de les ménager. Si nos juges de paix faisoient leur devoir, on les chasseroit toutes du royaume