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déjà fait assez connoître, en criant : « Ventrebleu ! voulez-vous tuer mon ami ? ».

Partridge, quoique d’un naturel très-pacifique, ne voulut pas rester spectateur oisif du combat que soutenoit son compagnon. L’adversaire qui lui étoit échue en partage, lui inspiroit d’ailleurs peu de crainte. Il rendit donc à l’hôtesse ses coups, à mesure qu’il les recevoit ; l’action étoit également vive de part et d’autre, et l’on ne pouvoit en prévoir l’issue, lorsque la dame demi-nue, qui avoit entendu du haut de l’escalier le dialogue précurseur du combat, descendit précipitamment, et sans considérer qu’il étoit peu généreux de se mettre deux contre un, tomba sur la pauvre femme qui étoit aux prises avec Partridge. Ce vaillant champion, encouragé par un renfort inattendu, redoubla ses efforts, au lieu de les ralentir.

Nos voyageurs auroient fini par triompher (car les plus braves troupes sont forcées de céder au nombre), si la servante Susanne ne fût venue, par bonheur, au secours de sa maîtresse. Cette Susanne savoit se servir de ses deux mains, aussi bien qu’aucune fille du pays. Elle auroit tenu tête à la fameuse Thalestris elle-même, ou à la plus valeureuse de ses amazones. Sa constitution mâle et robuste la rendoit propre au violent exercice du pugilat. Elle avoit les bras et les mains taillés