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ouvrages puisés à une source impure, soient impurs eux-mêmes, et contagieux pour le lecteur ?

Afin de prévenir désormais ce monstrueux abus des lettres, du temps, et de la liberté de la presse, surtout dans un moment où le monde en est plus menacé que jamais, nous indiquerons ici les qualités que doit posséder, à un haut degré, l’historien qui veut peindre les mœurs.

La première est le génie. Sans lui, dit Horace, l’étude ne sert de rien. Par génie, nous entendons ces facultés de l’esprit qui nous rendent capables d’approfondir tous les objets que le ciel a mis à notre portée, et d’en saisir les différences caractéristiques : en d’autres termes, c’est l’invention et le jugement qu’on a coutume de désigner sous le nom collectif de génie, comme des dons de la nature que nous apportons en naissant. Il nous semble qu’on est souvent tombé, sur ce point, dans une grande erreur ; car par invention, on entend généralement une faculté créatrice : ce qui tendroit à prouver qu’aucun écrivain n’en est mieux pourvu que la plupart des romanciers ; tandis que l’invention, suivant la signification propre du mot, n’est, dans la réalité, que l’art de trouver, ou pour nous expliquer plus clairement, qu’une sagacité vive et profonde qui pénètre l’essence de tous les objets de nos méditations. Ce talent ne peut guère exister sans le concours du