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à moins que vous ne trouviez quelqu’un qui consente à me prêter cent guinées, il faut que je me pende, que je me noie, ou que je meure de faim ; et à mon avis, ce dernier genre de mort est le plus fâcheux des trois.

« Je lui répondis qu’effectivement j’étois bien changé, depuis notre séparation ; que j’avois eu le bonheur de reconnoître l’extravagance de ma conduite et de m’en repentir. Je l’exhortai à suivre mon exemple, et conclus en l’assurant, que s’il avoit besoin de cent guinées pour arranger ses affaires, je les lui prêterois moi-même, à condition qu’il ne feroit plus dépendre son existence du caprice d’un dé.

« M. Watson, que la première partie de mon discours avoit presque endormi, se réveilla en sursaut à la seconde. Il me serra la main avec transport, me fit mille remercîments, et jura que j’étois un véritable ami. Il ajouta, qu’il espéroit que j’avois trop bonne opinion de lui, pour croire qu’après une expérience si funeste, il fût encore capable de mettre quelque confiance dans ces dés maudits, qui l’avoient tant de fois trompé. « Non, non, s’écria-t-il, que je sorte une bonne fois de l’abîme où la fortune m’a précipité ; et si jamais elle m’y replonge, je lui pardonne d’avance. »

« Je compris de reste sa pensée. « Monsieur