sûr de son indulgence, que je croyois l’être de sa colère, je doute encore si j’aurois eu le front de me présenter devant lui, et si j’aurois pu, à quelque prix que ce fût, me résigner à vivre avec ceux qui n’ignoroient pas la bassesse dont je m’étois rendu coupable.
« Je me hâtai donc de retourner à Londres, le meilleur asile ouvert à l’infortune et à la honte. Le malheureux, ou le coupable obscur y jouit des avantages de la solitude, sans en éprouver les inconvénients. Au milieu de la foule qui l’environne, pas un œil ne le remarque. Le mouvement et le tumulte d’une vaste cité, le spectacle des rues et des places publiques, cette scène animée dont l’aspect varie sans cesse, en occupant son esprit, l’empêchent de se dévorer lui-même, c’est-à-dire de se nourrir de chagrin et de remords, aliments funestes qu’aigrit encore l’isolement absolu.
« Mais il n’existe point ici-bas de bien sans mélange de mal. Cette indifférence générale a des suites fatales pour l’homme dénué d’argent. S’il n’est exposé à rougir devant personne, personne aussi ne connoît sa misère, et ne songe à la soulager : en sorte que l’infortuné peut mourir de faim, dans le marché de Leadenhall, comme au fond des déserts de l’Arabie.
« J’étois alors entièrement dépourvu de ce mé-