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avoit un fils nommé Francis, jeune homme de grande espérance. Nous allions ensemble à l’école. Je me souviens qu’il expliquoit les Épîtres d’Ovide, et qu’il étoit en état d’en traduire quelquefois deux ou trois vers de suite, sans dictionnaire. C’étoit d’ailleurs le plus brave garçon du monde ; il ne manquoit jamais d’assister, le dimanche, au service divin, et passoit pour un des premiers chantres de la paroisse. De temps en temps seulement il buvoit un coup de trop. C’étoit son seul défaut. »

« Fort bien, dit Jones, mais venons au fantôme.

— Patience, monsieur, patience, nous n’y viendrons que trop tôt. Vous saurez donc que le fermier Briddle perdit une jument alezane qui étoit une des meilleures bêtes que j’aie vues de ma vie. À quelque temps de là (je ne sais pas au juste le jour) le jeune Francis son fils étant allé à la foire de Hindon, devinez ce qu’il y rencontra ? un homme monté sur la jument de son père. Francis se mit aussitôt à crier au voleur. Comme la chose se passoit en pleine foire, je vous laisse à juger si le larron put s’échapper. Il fut pris, et conduit devant le juge de paix. C’étoit, il m’en souvient, M. Willoughby de Noyle. Ce digne et respectable magistrat l’envoya coucher en prison, et assigna Francis à se présenter