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pour confier au lecteur un secret que nous n’avons pas trouvé jusqu’ici l’occasion de lui apprendre, Partridge étoit jacobite, et croyoit que Jones, dévoué au même parti, alloit se joindre aux rebelles. Son opinion n’étoit pas dénuée de fondement. La dame à la taille gigantesque dont parle Hudibras, ce monstre auquel Virgile donne tant d’yeux, de langues, de bouches, et d’oreilles, avoit raconté la querelle entre Jones et l’officier, avec son respect ordinaire pour la vérité. Elle s’étoit plu à changer le nom de Sophie en celui du prétendant, et à publier que c’étoit pour avoir porté la santé de ce prince, que Jones avoit été blessé. Voilà ce qui étoit venu aux oreilles de Partridge, et ce qu’il croyoit fermement. Il n’est donc pas étonnant qu’il eût conçu de Jones une fausse opinion, et qu’il l’eût manifestée à moitié, avant de s’apercevoir de sa méprise. On en sera encore moins surpris, si l’on veut bien se rappeler avec quelle ambiguïté Jones communiqua d’abord sa résolution à Partridge. Les termes même qu’il employa, eussent-ils été moins équivoques, Partridge auroit pu les interpréter comme il fit, dans la persuasion où il étoit, que toute l’Angleterre partageoit en secret ses sentiments. Le parti que Jones avoit pris d’entrer dans un régiment, comme volontaire, ne servoit nullement à le détromper ; car il supposoit l’ar-