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mais j’aime les bons cœurs : de là vient amoris abundantia erga te[1]. »

Les malheureux ajoutent foi aisément aux moindres témoignages d’intérêt qu’on leur donne. Faut-il s’étonner que Jones, parvenu au comble de l’infortune, et confiant à l’excès, n’ait point hésité à croire aux démonstrations bienveillantes de Benjamin, et à lui ouvrir son cœur ! Les bribes de latin que le barbier appliquoit quelquefois d’une manière assez heureuse, sans prouver une érudition profonde, annonçoient, ainsi que sa conduite, un homme supérieur à son état, et confirmoient aux yeux de Jones ce qu’il lui avoit conté de sa naissance et de son éducation. « Eh bien ! dit notre héros, après s’être fait encore un peu presser, puisque vous êtes déjà si instruit de ce qui me touche, et que vous paroissez curieux d’apprendre le reste de mon histoire, je vais répondre à vos désirs, si vous avez la patience de m’écouter.

— La patience ! ah ! monsieur, je ne trouverai jamais que vous entriez dans trop de détails. Mille graces vous soient rendues, de l’insigne faveur que vous daignez me faire. »

Jones commença donc le récit de ses aventures. Il n’en omit qu’une ou deux, particulière-

  1. Ma vive affection pour vous.