et une connoissance approfondie du cœur humain.
Un excellent écrivain remarque très-judicieusement, qu’il est presque aussi impossible à la passion de faire agir un homme d’une façon opposée à son caractère, qu’à un fleuve rapide de remonter un bateau contre son cours. Qu’on attribue à Néron les vertus de Marc-Aurèle, et à Marc-Aurèle les crimes de Néron : y aura-t-il rien de plus choquant et de plus difficile à croire ? Mais qu’on restitue à chacun d’eux ses propres actions, il en résulte du merveilleux sans invraisemblance.
Nos poëtes dramatiques sont tombés, presque tous, dans le défaut que nous signalons ici. Leurs héros sont, pour l’ordinaire, d’insignes fripons, et leurs héroïnes de franches coquines durant les quatre premiers actes : puis au cinquième, les premiers deviennent d’honnêtes gens, et les secondes des femmes de bien, sans que le poëte se donne la peine d’expliquer un changement si soudain et une inconséquence si étrange. On ne sauroit effectivement en assigner d’autre raison, que la nécessité de finir la pièce : comme s’il étoit aussi naturel qu’un coquin se repentît au dernier acte d’un drame, qu’au dernier moment de sa vie. C’est ce qui se voit souvent à Tyburn, place qui pourroit fort bien servir à la représentation