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paroissiez rougir de confesser ouvertement votre foi.

— Eh bien ! un vrai chrétien ne doit-il pas trembler de nourrir dans son cœur un ressentiment que la loi de son Dieu condamne ? Puis-je me livrer, sur ce lit de douleur, à des projets de vengeance ? Comment me présenter devant le souverain juge, la conscience chargée du poids d’un pareil crime ?

— Je crois, qu’en effet, il existe un précepte qui interdit la vengeance ; mais un homme d’honneur ne peut l’observer ; et tout militaire doit être homme d’honneur. Je me souviens d’avoir, un jour, proposé le cas à notre aumônier, en buvant un bowl de punch avec lui. Il convint que la question étoit difficile à résoudre ; mais il espéroit, dit-il, qu’il y avoit, sur ce point, un privilége en faveur des gens d’épée : et certes, nous devons l’espérer comme lui. Le moyen de supporter la vie sans l’honneur ? Oui, oui, mon enfant, continuez à être un bon chrétien tant que vous vivrez, mais soyez homme d’honneur aussi, et ne souffrez jamais un affront. Tous les livres, tous les curés du monde ne me persuaderont pas d’être un lâche. J’aime beaucoup ma religion, j’aime encore plus mon honneur. Il faut qu’il se soit glissé quelque erreur dans le texte de la loi, ou dans la traduction, ou dans le com-