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« Je souhaiterois, dit le lieutenant, que vous fussiez aussi bien que vous croyez l’être ; vous pourriez demander sur-le-champ la réparation qui vous est due. Quand une affaire n’est pas susceptible d’accommodement, comme lorsqu’il s’agit d’une grave insulte, ou d’un soufflet, on ne sauroit la vider trop tôt ; mais j’ai peur que vous ne jugiez pas votre état, et que votre adversaire n’ait sur vous trop d’avantage.

— Je veux toutefois, répondit Jones, tenter l’aventure, si vous le permettez, et que vous ayez la complaisance de me prêter une épée ; car je n’en ai point à moi.

— La mienne est bien à votre service, mon cher enfant, s’écria le lieutenant, en l’embrassant. Vous êtes un brave, votre courage me plaît. Cependant je craindrois pour vous l’issue du combat. Un si rude coup, tant de sang perdu, doivent avoir épuisé vos forces. Vous ne sentez pas votre foiblesse, dans le lit ; elle vous trahiroit probablement, après avoir poussé une botte ou deux. Je ne puis consentir que vous vous battiez ce soir ; mais vous nous rejoindrez, j’espère, dans peu de jours, et je vous donne ma parole d’honneur que vous aurez satisfaction, ou que l’homme qui vous a outragé sortira du régiment.

— Je voudrois, dit Jones, qu’il fût possible d’en finir dès ce soir. Maintenant que vous avez