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CHAPITRE I.

affirmer, avec autant de logique que de franchise, qu’il n’existe rien de tel dans l’univers.

Pour éviter néanmoins, s’il est possible, toute discussion avec ces prétendus philosophes, et pour leur prouver notre sincère désir de la paix, nous leur ferons quelques concessions qui pourront terminer entre eux et nous le débat.

Nous conviendrons d’abord que beaucoup de gens, et surtout les philosophes, sont fort étrangers à l’amour.

En second lieu, que l’amour, dans le langage ordinaire, c’est-à-dire le désir de satisfaire un violent appétit causé par la peau blanche et délicate d’une belle femme, n’est point la noble passion, objet de notre apologie. Le véritable terme pour caractériser ce désir effréné, seroit la faim ; et comme nul gourmand ne rougit d’appliquer le mot j’aime, aux divers mets qui flattent sa sensualité, un amant qui ne connoît que l’amour physique, peut dire avec une égale propriété d’expression, qu’il a faim de telle ou telle femme.

Nous avouerons en troisième lieu (concession qui ne manquera point d’être bien reçue), que si l’amour en faveur duquel nous plaidons, se montre plus délicat dans ses jouissances, il ne les cherche pas avec moins d’avidité que le plus grossier de nos appétits.

En un mot, nous reconnoîtrons que l’amour,