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gure de la maîtresse n’avoit rien à reprocher à celle de l’amant. Nous essaierions de tracer ici son portrait, si nous n’avions été devancé par un plus grand maître que nous, M. Hogarth, chez qui elle se fit peindre il y a nombre d’années. Ce célèbre artiste vient de reproduire ses traits dans son tableau d’une Matinée d’hiver, où elle présente un assez juste emblème de la saison. On la voit marcher (car elle marche en effet dans le tableau) vers l’église de Covent-Garden, suivie d’un petit laquais étique, portant sous le bras son livre d’heures.

Le capitaine, non moins sage que miss Bridget, préféroit aux agréments fugitifs de la figure, les avantages durables d’un riche mariage. Il étoit du nombre de ces philosophes qui regardent la beauté, dans l’autre sexe, comme une qualité superficielle et indigne d’attention, ou pour parler clairement, qui aiment mieux une femme laide avec toutes les commodités de la vie, qu’une belle femme sans aucune de ces commodités. Doué d’un excellent appétit, et d’un goût peu délicat, il croyoit la beauté un assaisonnement inutile au banquet nuptial.

Ne dissimulons rien ; le capitaine, depuis son arrivée, ou du moins depuis que son frère lui avoit communiqué ses vues, et long-temps avant qu’il eût découvert dans miss Bridget le moin-