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pagnes n’étoit disposée à nourrir de l’encens qu’elle se croyoit en droit d’exiger : aussi au lieu de respects et d’hommages, sa riche parure ne lui attira que des marques de haine et de mépris. On s’écria d’une commune voix, qu’il étoit impossible qu’elle possédât honnêtement de si beaux atours, et les mères, loin d’en souhaiter de pareils à leurs filles, se félicitèrent de leur modeste simplicité.

Ce fut peut-être cette aventure qui engagea la commère à désigner d’abord Jenny à mistress Wilkins ; mais une autre circonstance confirma aux yeux de celle-ci, les soupçons de son accusatrice. Jenny, dans ces derniers temps, alloit souvent chez M. Allworthy. Pendant une violente maladie de miss Bridget, elle avoit passé plusieurs nuits auprès d’elle, en qualité de garde. Mistress Wilkins elle-même l’avoit vue au château la veille du retour de M. Allworthy, sans concevoir, toute fine qu’elle étoit, le moindre doute sur sa vertu ; car elle avoit toujours, disoit-elle, regardé Jenny comme une honnête fille, quoiqu’elle la connût fort peu, et auroit plutôt soupçonné quelqu’une de ces petites coquettes du village, qui se donnoient des airs, parce qu’elles se croyoient jolies.

Jenny, sommée de comparoître devant mistress Wilkins, obéit sur-le-champ. À sa vue, la