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dant le milan, fier de sa puissance, plane orgueilleusement au haut des cieux, épiant le moment de fondre sur sa proie.

Semblable à ce terrible ennemi du peuple ailé, mistress Wilkins, à son arrivée dans le village, y répand l’épouvante. Toutes les femmes effrayées rentrent à la hâte dans leurs demeures. Chacune craint d’être l’objet de sa visite. L’altière gouvernante s’avance la tête haute et d’un pas mesuré ; pleine du sentiment de sa supériorité, elle rêve aux moyens d’assurer le succès de sa mission.

Avec un peu de perspicacité, on n’infèrera pas de notre comparaison que les pauvres villageoises eussent quelque soupçon du motif qui conduisoit chez elles mistress Déborah. Toutefois comme il pourroit fort bien s’écouler un siècle entier, avant qu’un habile commentateur s’avisât de faire sentir la beauté de cette comparaison, il nous semble à propos d’en expliquer tout de suite le sens mystérieux.

Notre intention a été de faire entendre, que s’il est dans la nature du milan de dévorer les petits oiseaux, il est aussi dans la nature des Déborah et de leurs semblables, d’insulter et de tyranniser le petit peuple. C’est ainsi que la classe domestique a coutume de se venger de son asservissement aux volontés d’un maître ; et doit-on s’étonner que d’humbles esclaves exigent de