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à son service, que cinq cents livres ; et voilà comme il me traite ! la belle manière d’encourager les domestiques à être honnêtes ! car enfin, si je me suis permis, de temps en temps, de prendre quelques bagatelles, d’autres ont pris dix fois davantage : et maintenant il nous confond tous ensemble. Oh ! s’il en est ainsi, que le legs s’en aille au diable avec le testateur… Mais non, je ne veux point y renoncer ; cela causeroit trop de joie à certaines gens… Je ferai mieux, j’en achèterai une robe de la couleur la plus gaie que je pourrai trouver ; une vraie robe de bal, et j’irai danser avec sur la tombe de ce vieux ladre. Voilà donc ma récompense d’avoir pris si souvent son parti, quand tout le canton lui jetoit la pierre, pour la façon scandaleuse dont il élevoit son bâtard ! Mais patience, il va dans un lieu où tout cela lui sera compté. Assurément il auroit mieux fait de se repentir de ses péchés à l’article de la mort, que d’en tirer vanité, et de donner le bien de sa famille à un bâtard. Pense-t-il nous faire accroire qu’il l’a trouvé, par hasard, dans son lit ? la jolie histoire ! ah, ah ! ceux qui cachent une chose, ne sont point en peine de savoir où la retrouver. Dieu lui pardonne : mais si l’on parvenoit à découvrir la vérité, ce ne seroit pas, je gage, le seul bâtard dont il auroit à répondre. Ce qui me console, c’est qu’ils seront tous connus,