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nédiction. Adieu, je pars… quelques moments avant vous. »

En cet instant, un domestique entra précipitamment et annonça l’arrivée d’un procureur de Salisbury, chargé d’un message secret qu’il ne pouvoit, disoit-il, communiquer qu’à M. Allworthy en personne. Il ajouta que ce procureur paroissoit très-pressé, et se plaignoit d’avoir tant d’affaires sur les bras, qu’il ne viendroit jamais à bout de les expédier toutes, quand il se mettroit en quatre pour cela.

« Allez, mon enfant, dit M. Allworthy à Blifil, et voyez ce que me veut cet homme. Je suis hors d’état de m’occuper d’affaires ; je n’en ai point, d’ailleurs, qui ne vous intéresse maintenant plus que moi. Il m’est impossible de recevoir qui que ce soit ; mon esprit n’est plus capable d’attention. » À ces mots, il les congédia, en leur disant qu’il ne perdoit pas l’espérance de les revoir encore ; mais qu’après une si grande fatigue, il avoit besoin de repos.

Quelques-uns des spectateurs de cette triste scène se retirèrent, en versant des larmes. Le philosophe Square lui-même essuyoit ses yeux, peu accoutumés à en répandre. Pour mistress Wilkins, les pleurs tomboient goutte à goutte de sa paupière, comme la gomme, des arbres de l’Arabie. C’étoit une simagrée que n’omettoit jamais