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favorisoit de tout son pouvoir. Il n’en étoit pas de même de la sœur aînée : elle portoit à Molly tant d’envie et tant de haine, qu’elle auroit sacrifié de bon cœur sa part du profit, pour avoir le plaisir de la déshonorer et de nuire à son trafic. Elle apprit donc à Jones que sa sœur étoit au lit, dans l’espoir qu’il la surprendroit entre les bras de Square : ce qui n’auroit pas manqué d’arriver, si Molly n’avoit pris la précaution de fermer sa porte aux verrous. Elle eut ainsi le temps de cacher son amant derrière le rideau, où il fut si malheureusement découvert.

À l’apparition soudaine de Square, Molly désespérée enfonça sa tête sous la couverture, et s’écria qu’elle étoit perdue. La pauvre fille, encore novice dans son métier, manquoit de cette insigne effronterie qui sert si bien, en pareil cas, les femmes du grand monde, soit en leur fournissant à propos une adroite excuse, soit en les armant d’audace pour braver la colère d’un époux qui, de peur d’un éclat, par amour du repos, ou par crainte du galant, se contente ordinairement de fermer les yeux et de se taire. Molly, confondue par la présence de Square, n’essaya plus de soutenir une cause qu’elle avoit défendue jusque-là avec tant de larmes, avec tant de protestations d’amour et de fidélité.

Le personnage découvert derrière la tapisserie