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quoique beaucoup moins gai que l’arlequin français, avec lequel il n’a aucun lien de parenté, recevoit toujours du public un accueil favorable, parce qu’il le débarrassoit d’une compagnie encore plus ennuyeuse que la sienne.

Les écrivains judicieux ont pratiqué avec succès l’art des contrastes : aussi je m’étonne du reproche qu’Horace fait à Homère :

Je m’indigne, en voyant dormir le bon Homère[1].</poem>

À la vérité, le poëte latin se contredit dans le vers suivant :

Mais dans un long ouvrage, on peut bien sommeiller[2].

Qu’on n’aille pas s’imaginer qu’un auteur s’endorme réellement, en écrivant. Les lecteurs, il est vrai, ne sont que trop disposés à se laisser surprendre par le sommeil ; mais un auteur, son ouvrage fût-il aussi long qu’aucun de ceux d’Oldmixon, y trouve tant de plaisir, qu’il n’a garde de s’assoupir un moment. Suivant la remarque de M. Pope,

Il ne dort point, afin d’endormir son lecteur[3].

À dire vrai, les parties soporifiques d’un livre sont celles, où l’on sème adroitement des réflexions

  1. Indignor quandoque bonus dormirat Homerus.Horace.
  2. Verum opere in longo, fas est obrepere somnum.Horace..
  3. Sleepless himself, to give his reader sleep.