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CHAPITRE IX.



SCÈNE ORAGEUSE.

Molly eut à peine repris ses haillons accoutumés, que ses sœurs l’accablèrent d’injures. « Mademoiselle, dit l’aînée, n’a point à se plaindre de son sort. Quelle audace à elle, de porter une robe dont la jeune miss Western avoit fait présent à ma mère ! Si l’une de nous avoit droit de s’en parer, c’étoit bien moi, je pense ; mais mademoiselle s’imagine que sa beauté mérite, en toutes choses, la préférence : car elle se croit plus belle qu’aucune de nous. — Donnez-lui le morceau de miroir qui est sur le buffet, dit une autre ; à sa place, j’essuierois le sang qui souille mon visage, avant de parler de ma beauté. — Vous auriez mieux fait, reprit l’aînée, de suivre les conseils de monsieur le curé, que de courir après les garçons.

— Tu as raison, mon enfant, dit la mère en sanglotant, voilà comme elle s’est perdue. Elle nous couvre toutes d’opprobre : c’est la première de la famille qui se soit déshonorée.