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sa ridicule parure et la jalousie qu’elle excitoit parmi ses compagnes. De retour au château, elle fit venir Black Georges. « Amenez-moi votre fille, lui dit-elle, j’ai envie de la placer chez mon père. Peut-être même la prendrai-je auprès de moi, quand ma femme de chambre que je renvoie, sera partie. »

À ces mots, le pauvre Seagrim, instruit de l’état de sa fille, demeura comme frappé de la foudre. Il répondit en balbutiant : qu’il craignoit que Molly ne fût pas assez adroite pour servir mademoiselle Sophie, n’ayant jamais été en condition.

« N’importe, reprit Sophie, votre fille se formera ; elle me plaît, et je veux en essayer. »

Black Georges se hâta de retourner chez lui. Il comptoit sur les bons conseils de sa femme, pour se tirer d’affaire. À son arrivée, il trouva toute sa maison en rumeur. La fatale robe en étoit cause.

Après la retraite de l’écuyer Allworthy et de la noblesse du canton, l’orage que leur présence avoit contenu, éclata avec furie. Aux risées, aux sifflets, aux injures, aux gestes menaçants, succédèrent les voies de fait ; et quoique les armes employées en cette circonstance ne fussent point, par leur mollesse, de nature à causer aux combattants la perte de la vie, ou celle d’un membre, elles n’en étoient pas moins redoutables pour une personne aussi élégamment vêtue que Molly. Son