Il y a, dit très-bien Congrève, dans la vraie beauté, un charme secret qui échappe aux ames vulgaires. Nous ajouterons que ce charme se dévoile aux ames délicates, sous les haillons mêmes de la misère.
Tom ne fut pourtant frappé des attraits de Molly, que quand elle eut atteint sa seizième année. Alors seulement, plus âgé qu’elle d’environ trois ans, il commença à en devenir épris. Encore l’aima-t-il long-temps, avant de pouvoir se résoudre à chercher les moyens de la posséder, tant ses principes de vertu combattoient puissamment la violence de ses désirs. Séduire une jeune fille, quelque obscure que fût sa condition, lui paraissoit un crime impardonnable ; et son amitié pour le père, sa compassion pour une nombreuse famille, fortifiant dans son cœur les conseils de la sagesse, il résolut de triompher de sa passion, et laissa trois mois entiers s’écouler sans aller chez Georges Seagrim.
Molly passoit, comme on l’a dit, pour une très-belle fille ; mais sa beauté, dépourvue de grace, tenoit fort peu de la délicatesse de son sexe, et auroit aussi bien convenu à un homme qu’à une femme. La fleur de la jeunesse et de la santé, en faisoit le principal mérite.
Chez elle, le moral ressembloit au physique. Autant elle étoit grande et robuste, autant elle