l’amant le plus tendre ; et Tom guidé par le seul désir de plaire, faisoit, à son insu, plus de progrès dans le cœur de Sophie, que s’il avoit eu des desseins sérieux sur sa personne.
Mais on doit peu s’étonner que cette passion naissante échappât à des yeux étrangers, puisque Sophie elle-même n’en avoit nulle connoissance. Son cœur étoit perdu sans retour, avant qu’elle soupçonnât qu’il fût en danger.
Tel étoit l’état des choses, lorsqu’une après-midi Tom trouvant Sophie seule, lui dit d’un air grave, et après quelques excuses préliminaires, qu’il avoit une grace à lui demander, et qu’il espéroit qu’elle daigneroit la lui accorder.
Ni le début, ni les manières du jeune solliciteur n’étoient de nature à inspirer à Sophie le soupçon qu’il voulût lui parler d’amour. Cependant, soit par un secret avertissement de la nature, soit par toute autre raison que nous ignorons, il est certain que quelque idée de ce genre lui vint à l’esprit ; car son visage se couvrit d’une subite pâleur, ses genoux tremblèrent, et la parole eût expiré sur ses lèvres, si Jones se fût arrêté pour attendre sa réponse. Heureusement il la tira bientôt d’anxiété, en lui apprenant qu’il venoit recommander à sa protection Black Georges le garde-chasse, dont la ruine et celle de sa nombreuse famille étoient inévitables, si M. Wes-