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mais quand l’exercice ou la pudeur en augmentoit la couleur naturelle, il effaçoit le plus bel incarnat. Ces vers du célèbre docteur Donne sembloient faits pour elle[1] :

Un sang pur et vermeil animoit son visage,
Et sembloit lui prêter un éloquent langage.
On eût dit que ses yeux, que sa bouche pensoient.

Son cou long et poli s’arrondissoit avec grace. Si nous ne craignions de blesser sa modestie, nous dirions que les appas qui en étoient voisins, surpassoient ceux mêmes de la Vénus de Médicis. On ne pouvoit leur comparer ni la neige, ni l’albâtre, et la gaze la plus fine sembloit ne couvrir que par jalousie ce sein éblouissant dont elle n’égaloit point la blancheur[2],

Le marbre de Paros n’offroit rien de si pur.

Telle étoit l’aimable Sophie ; et ces belles formes avoient reçu du ciel une habitante digne de les animer. Son ame répondoit à sa figure ; celle-ci empruntoit même quelques charmes de la première. Quand elle sourioit, son angélique douceur communiquoit à sa physionomie une expres-

  1. Her pure and eloquent blood
    Spoke in her cheeks, and so distinctly wrought
    That one might also say that her body thought
    .

  2. Nitor splendens Pario marmore purior