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pour Georges, il tenta un autre moyen de prévenir sa ruine.

Jones entretenoit, depuis peu, des relations très-fréquentes avec M. Western. Il s’étoit acquis une haute estime dans l’esprit du vieux chasseur, par son adresse à franchir les fossés, les haies, les barrières, et par cent autres prouesses aussi brillantes. L’écuyer disoit de lui, qu’avec des encouragements convenables, on pourroit en faire un grand homme ; il regrettoit souvent de n’avoir pas un fils qui lui ressemblât, et un jour, dans une orgie, il paria mille guinées que Tom étoit en état de conduire une meute, aussi bien que le meilleur chasseur du canton.

Grace à ces merveilleux talents, notre jeune homme avoit si bien su plaire à M. Western, qu’il étoit le compagnon habituel de ses chasses, et le convive le plus fêté à sa table. Tout ce que l’écuyer aimoit le mieux, ses fusils, ses chiens, ses chevaux, n’étoient pas moins à la disposition de Tom, que s’il les eût possédés en propre. Il conçut donc le dessein d’employer son crédit à servir son ami Black Georges, et de lui procurer chez M. Western une place pareille à celle qu’il occupoit auparavant chez M. Allworthy.

Quand on songe aux anciens sujets de plaintes que cet homme avoit donnés à M. Western, et au courroux qu’inspiroit au gentilhomme la gra-