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absorbé, tandis qu’un sourire ironique flottait sur ses lèvres.

Annette voyait la transformation qui s’opérait, mais ne s’en souciait pas. Elle entama la conversation en ralentissant encore son pas :

— Je m’amuse beaucoup à Vichy, c’est la première fois que j’y viens. Je ne voyage jamais. Il paraît que vous avez visité beaucoup, beaucoup de pays.

— Quelques-uns, oui mademoiselle.

— Lequel préférez-vous, à part le vôtre, bien entendu.

— Mon Dieu, c’est assez difficile à dire, chaque contrée a son bon et son mauvais côté.

— Et les jeunes filles, monsieur, vous avez bien une opinion sur les jeunes filles ?

Luc pensa en souriant : Nous y voilà, de quelque pays qu’elles soient, les jeunes filles cherchent toujours un mari. Que de fois il m’a fallu briser brutalement un rêve. J’ai l’air bien mariable, sans doute.

Il répondit tout haut :

— Dans tous les pays du monde, mademoiselle, les jeunes filles sont charmantes. Il n’y a que quand elles sont mariées qu’on s’aperçoit parfois qu’elles sont le contraire de ce qu’on supposait.

Il ajouta en riant, devant les yeux interloqués de sa partenaire :

— J’en dis autant pour les jeunes gens.

— Malgré ce correctif, joint par politesse, riposta vivement sa compagne, je suis forcée de défendre mes sœurs. Nous ne sommes pas si fausses, j’ajouterai même que nous sommes toujours sincères ; seulement un jeune homme nous voit souvent comme il veut nous voir, et plus tard, il nous découvre comme nous sommes.

Cela fut dit avec un ton sérieux qui contrastait avec les manières enfantines d’Annette.

Luc fut à son tour, décontenancé par cette sagacité précoce et considéra la jeune fille avec plus d’attention.

Il répliqua avec une pointe d’admiration :

— Cette réflexion est digne d’un penseur, made-