— Des blanches, des roses, des rouges ?
— Des blanches et des roses.
— Savez-vous ce qu’elle en a fait ?
— Non.
— Eh ! bien, elles ornent la boutonnière de ses deux sigisbées.
Madame Bullot resta un moment silencieuse, puis elle dit lentement :
— Je suis étonné de ce que tu avances là, parce que ce n’est nullement dans les habitudes de Sylviane.
Le visage de Luc se détendit.
— Cependant, reprit-il.
— Tu l’as su, elle y a fait allusion, ou bien ces jeunes gens te l’ont fait entendre ?
— Ce ne sont que des présomptions, mais je les crois justifiées.
— Je doute encore, j’amènerai Sylviane à m’avouer la vérité, elle n’a jamais menti, elle est aussi franche que belle, elle n’a qu’un défaut : elle est fière.
— Ah ! je le sais.
— Et malheureusement, elle en pâtit.
— Elle a un autre défaut, ma tante, c’est de se laisser courtiser par des nullités. Les femmes ne savent guère ce qu’elles font ! Il vaudrait mieux passer sur mon semblant d’offense que d’épouser un de ces garçons.
— Tu parles à ton point de vue, et au titre d’offensé.
— Vous verrez, ma tante, qu’elle les épousera !
— Allons, Luc, modère-toi. D’abord, elle ne pourra en épouser qu’un, et si tu l’y pousses.
— Que puis-je tenter ?
— Tu es venu ici dans une intention bien arrêtée : celle de la conquérir, je ne vois pas que tes affaires avancent beaucoup.
— Si je pouvais lui parler de temps à autre ! mais elle n’est jamais seule.
— Il n’y a que trois jours que nous sommes là !
— Un siècle pour le temps perdu.
— Tu es donc bien amoureux ?
— Je n’en sais rien, je me sens surtout irrité.