— Que je suis contente… murmura Sylviane.
— Nous allongerons ceci… nous raccourcirons cela…
Les minutes passèrent dans l’arrangement passionné de l’œuvre.
Vidal riait, soulevé d’enthousiasme, le cerveau tendu vers la libération.
Sa femme remarqua, radieuse :
— Il y a longtemps que tu n’avais ri…
— Je réapprends… tout arrive…
Il esquissait le chant et battait la mesure.
— Nous allons vite… disait-il… ce sera prêt… J’ai aussi quelques fragments qui trouveront leur place… nous aurons un succès fou… ces airs sont charmants… cet autre convient par sa gravité… celui-ci par son originalité… Marie joue un peu ce feuillet-là… plus doux… que la fin se perde… tout émue… la la la la… tu comprends ?
Marie Vidal reprenait le motif.
— Vous inscrivez les paroles, mademoiselle ?
— C’est fait… cela s’adapte on ne peut pas mieux.
— J’en étais sûr…
Madame Vidal dut sortir pour imposer silence aux enfants.
— Ils ont bien déjeuné… murmura le père.
Un nuage passa sur son front, mais il poursuivit d’un accent plus joyeux :
— Espérons que je pourrai leur donner l’habitude de manger « bien » tous les jours…
Sylviane ne répondit que par un regard qui acquiesçait à ce souhait si légitime.
Madame Vidal survint avec un plateau où étaient des tasses à thé.
— Nous allons nous réconforter un peu… dit-elle.
— Il est déjà quatre heures ! s’exclama le musicien.
— Il va même en être cinq… répondit sa femme.
— Mon Dieu… déjà !… murmura Sylviane… je n’ai plus grand temps…
— Nous n’avons pas fini !… s’écria Vidal.
— Je le sais… répondit Sylviane en souriant…