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bien surprenant que nous n’arrivions pas au but.

Si un faible espoir s’introduisait dans la tristesse de Sylviane, elle n’en restait pas moins anéantie par ce nouveau retard qui pouvait s’éterniser.

Cependant, il fallait qu’elle se dominât… Luc aussi avait souffert.

Elle reprit le chemin du retour, cherchant encore quel moyen serait le meilleur pour rattraper le fugitif. À mesure que l’heure passait, elle trouvait la situation presque comique, mais quand elle en souriait, une crainte surgissait. Elle évoquait le pire, Luc se mariant… Elle se demanda un moment si elle ne partirait pas pour la frontière de la Hollande, afin d’arrêter le jeune homme au passage. Mais outre que cette solution serait coûteuse, elle la jugeait aussi des plus aléatoires.

Non, il était plus sage d’attendre tranquillement le dénouement. Dans certains cas, un peu de fatalité ne nuit pas et Sylviane se disait que c’était l’heure de montrer une philosophie saine.

Elle arrangea donc sa vie, comme si Luc n’existait pas, afin de remplir ses journées d’une façon absorbante. Elle pensa avec force à sa musique délaissée et projeta de travailler. Possédant l’instinct de la composition, elle se lança dans les problèmes de l’harmonie sous la conduite de son professeur.

Cette occupation difficile concentra son esprit et tout en s’écartant du monde, c’est-à-dire en ne comptant pas sur lui comme distraction, elle eut des jours qui ne connurent plus l’ennui.

Son intelligence était satisfaite, et dans le labeur quotidien, elle s’éleva encore.

Un mois passa, un mois court, pour le travail, long pour son cœur.

Août brûlait Paris, mais la jeune fille ne songeait pas à la chaleur.

Septembre passa et l’on fut en Octobre.

Quand Sylviane pensait à l’été écoulé, elle en était stupéfaite.