Ici, Francis poussa une exclamation qui ressemblait à un soupir et répéta en écho :
— Nous avons rencontré mademoiselle Foubry.
— Alors, poursuivit Louis, nous avons eu le même but, qui a failli nous brouiller : être l’élu de cette beauté.
— Malheureusement, nous n’avons été nullement appréciés malgré nos qualités.
— Heureusement ! veux-tu dire, sans quoi notre rivalité eût été terrible ! aimer la même femme et l’un de nous, son mari !
— C’est vrai, il vaut mieux être égaux dans notre infortune.
— Crois-tu que ce soit une infortune ?
— Une déception est toujours douloureuse au moment où on la subit.
— Enfin, nous n’avons plus rien à espérer, le fait est là ; mademoiselle Foubry ne nous a jamais encouragés, et, elle en aime un autre.
— Hélas !
— Sois raisonnable, tu vois mon courage : imite-le !
— Tu as peut-être moins de cœur que moi, dit Francis.
— Je suis sûr d’en avoir autant, et quand je suis obligé de faire tuer un de mes lapins, j’ai le cauchemar trois nuits durant ; cela te renseigne sur l’homme que je suis.
— Tu as été à la guerre, pourtant !
— Eh ! oui, mais ce n’est pas la même chose ; à la guerre on sait que ce sont des ennemis, tandis qu’un lapin, mon cher, un gentil petit lapin, c’est affreux d’expédier un animal semblable dans le néant.
— Tu vas aussi à la chasse.
— Et comment !! mais là, on se dit : ce sont des ennemis, pan ! pan !
— Le cœur de l’homme est une énigme soupira Francis.
— Et du cœur de la femme, qu’en diras-tu ?
— Oh ! celui-là ! on en fait vite le tour, parce qu’il n’existe pas !
— Tu crois ?