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SUR LE SOL D’ALSACE

Avouerait-elle alors sa détresse ? son patriotisme tardif mais d’autant plus fort ? Accuserait-elle l’indifférence des générations récentes dont elle comprenait maintenant toutes les périlleuses conséquences ?… Louise sent l’angoisse la terrasser. Un effort chasse son malaise. Marianne est debout devant elle, dans une attitude désolée et pleine de respect pour sa rêverie.

Elle doit oublier ses propres souffrances pour réconforter la pauvre femme. Elle lui dit :

— Laissons les choses s’accomplir… Mais, Marianne, je t’en supplie, ne me parle plus de départ… j’ai trop besoin de toi…

— Ah ! si je ne vous aimais pas tant, sanglota Marianne, il y a longtemps que je ne serais plus ici !

Louise embrassa la fidèle servante dont les joues tremblaient sous l’excès de l’émotion. Puis, sans ajouter un mot, le cœur serré par cette succession d’incidents, elle alla dans le parc. Un besoin d’air, de mouvement la poussait hors de sa demeure où elle étouffait. Ses pensées tourbillonnaient sous son front et la fièvre enflammait son visage.