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prudence rocaleux

empreintes d’un accent bizarre. Elle paraissait savoir la vérité en feignant de l’ignorer. Elle invitait M. Rembrecomme à trouver le motif.

Le jeune homme dit posément :

— Mon père, à sa mort, a stipulé dans son testament qu’une rente serait laissée à ses serviteurs ; mais je ne pense pas qu’Apollon ait visé ce but, car il est encore jeune et avait plus de bénéfice à se trouver au service de mon père.

— Monsieur ne voit pas clair. Apollon a tué la poule aux œufs d’or, sauf vot’ respect. Il n’y a pas de bon sens de raconter à son valet de chambre qu’on lui laisserait une rente. C’est une invite à la mort ! Ce malheureux monsieur tendait le cou à cet Apollon. Monsieur qui a des rentes n’a donc pas réfléchi au beau tableau que représente une rente pour des gens qui n’en ont pas ? C’est un coin du paradis ! J’espère, Monsieur, que ce sera une leçon pour vous. Y n’ faut pas tenter les gens, à moins que ce ne soit des gens honnêtes. Ainsi, à moi, vous pourriez me promettre tout ce que vous voudriez, y a pas de danger que je vous assassine. D’abord, je ne pourrais même pas tuer un poulet. Vot’ Apollon le pourrait, lui ! il a des yeux de tigre. Y ferme les paupières, mais par la fente, y a une lueur qui passe, y voit tout.

Prudence frissonnait, M. Rembrecomme lui dit :

— Vous êtes observatrice !

Il était de nouveau assis et, sur ses ins tances, Prudence prit un siège en face de lui.

— Comment vous est-il venu à l’idée qu’Apollon soit le meurtrier de mon père ?

— J’ai cherché, Monsieur.

— Mais, pourquoi avez-vous choisi mon