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prudence rocaleux

Prudence se remit et retrouva providentiellement sa faconde :

— Monsieur, je n’ai pu résister au désir de vous dire que je suis de tout cœur avec vous. Vot’ pauv’ papa ! quelle fin pour lui ! et vous, en voyage pendant ce temps… Quelle surprise pour un retour ! Bien sûr que vous vous dites : « Si j’avais été là, l’assassin ne serait pas venu » ; mais ne vous désolez de rien, Mossieu, parce qu’il serait venu un autre jour. Quand on doit mourir assassiné, vous savez bien qu’on ne doit pas mourir autrement. Avez-vous des soupçons sur ce brigand ? Non ? Moi, je le cherche aussi et mon cœur est avec la police. Il suffit de rien pour prendre un homme et je me figure que j’y arriverai. Où qu’il a été tué, vot’ pauv’ père ?

M. Rembrecomme, étourdi par ces paroles, répondit machinalement :

— Dans sa chambre à coucher.

— Je peux voir la porte ?

— Oui, mais il est interdit d’entrer. C’est celle-ci.

M. Rembrecomme souleva une portière, et Prudence vit une porte semblable aux autres portes. Ah ! comme ses yeux la parcoururent ! Tout à coup, son regarda se dilata. Au long de la portière, vers le milieu, elle aperçut une touffe de cheveux, oh ! non un gros paquet ; il était mince, formé par une douzaine de cheveux. Il était accroché là, on ne savait par quel destin, à la frange qui garnissait le rideau.

Prudence ne savait plus comment contenir son émotion, et comment surtout s’emparer de ces cheveux qu’elle jugeait révélateurs.

Elle eut une exclamation, comme si elle trébuchait, se retint à la portière à la place des cheveux qu’elle arracha, et les serra dans ses doigts en s’écriant :