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prudence rocaleux

Elle rentra rayonnante. Mme Dilaret constata cette transformation et se figura qu’elle triomphait pour son idée.

Sévèrement elle la prévint :

— Prudence, je suis désolée de la besogne que vous avez faite vis-à-vis de cette inconnue, Ce n’est pas ainsi que je désire marier mon fils. Nous avons de bons amis, ayant de charmantes filles et, sans me vanter, je puis vous assurer que nous n’avons que l’embarras du choix.

La servante écouta ce sermon sans un mot. Elle se sentait coupable, mais avouer ses torts est surhumain. Elle augurait qu’elle serait à jamais perdue dans l’esprit de sa patronne. Elle prit un temps pour répondre.

— Madame, j’ai réfléchi… j’ai fait parler à fond mes personnages… le père, je l’ai vu… Il n’est pas sénateur, j’avais confondu. Il est lapineur… C’est une profession qu’on ne connaît pas encore beaucoup parmi les amis de Madame : mais ça peut venir. J’en parlerai plus tard à Madame : aujourd’hui, les mots ne me viennent pas. Quant à la fille, sa blondeur est du teint… mais ça ce n’est rien, le plus grave, c’est que je ne connais tout à fait les gens qu’à la Messe. Eh bien ! j’ai demandé à cette petite à quelle paroisse elle allait. « Paroisse ? qu’elle m’a fait, Je ne vais pas à la Messe. » Alors, Madame comprend ? Pas moyen de deviner ses défauts ! m’est avis, entre nous, qu’elle doit en avoir beaucoup. Madame me rendra cette justice, que je suis aussi prudente que mon nom, et que je n’ai pas voulu plonger not’ cher M’sieu Jacques dans l’ennui.

Et Prudence regarda Mme Dilaret d’un air qui signifiait : Trouvez à redire à mes paroles.