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prudence rocaleux

— Non, Madame…

Votre certificat est très bon… Cependant, il y a une petite restriction, vous êtes quelque peu autoritaire… Un peu familière aussi, et je n’aime pas beaucoup cela…

Prudence ne cacha pas son indignation. Elle eut un cri :

— C’est des menteries !

Mais elle se calma tout de suite et ajouta d’une voix assourdie :

— La dame d’où je viens n’était pas charitable… Si je voulais raconter ses défauts, il est probable que je la trouverais autoritaire, parce qu’elle me commandait sans arrêt, et qu’elle était familière, vu qu’elle m’appelait Prudence et que je lui disais Madame… Et il est presque certain que ce sera du pareil au même, ici…

Mme Dilaret écoutait ces paroles avec des yeux tout ronds. Enfin, elle dit :

— Vous avez raison, Prudence (et elle appuya sur le prénom), ce sera pareil, ici.

— J’ai fait mon sacrifice, répliqua paisiblement la future servante avec grandeur.

Mme Dilaret ne trouva pas de réponse, et ce fut un silence que Prudence rompit.

— Il est 10 heures, si Madame veut déjeuner aujourd’hui, il serait peut-être temps que je sache où est le fourneau. Un repas pour combien de personnes ? Madame a un mari vivant, que j’ crois ?

Mme Dilaret reprit ses esprits pour crier :

— Dieu, merci ! oui, il est vivant !

— Tant mieux pour Madame, et tant pis pour moi. Chez mon ancienne patronne, il était mort, de sorte qu’on était tranquille.

— Vous exagérez, Prudence, gronda sévèrement Mme Dilaret.

— Je sais ce que je sais, mais passons ! je reviens au repas… Il y a donc vot’ mari,